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Foot and Sports 1981
19 mars 2023

Foot amateur-Educateur : "Je suis dégouté"

 

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Si j'écris ce post, c'est que j'en ai vraiment "gros sur la patate" comme on dit chez moi. Je ne reconnais plus mon football et je suis dégouté. 

Je ne vais pas faire mon vieux con en voulant expliquer que le foot c'était mieux avant, que les valeurs étaient plus respectées, etc... C'est faux. Je pense seulement que cela vient de plus loin, de plus haut. Les débordements chaque week-end sont le reflet d'une société qu'on laisse s'engluer sans que nos responsables se rendent compte de ce qu'ils ont laissé faire. 

Je suis issu du monde amateur, je suis un petit homme qui ne vaut rien dans ce monde du foot. Mais je vais quand même m’exprimer.

Le football, c'est toute ma vie

Comme beaucoup d'entre vous, c'est votre papa, votre maman, frère ou sœur, voire grand-père qui vous a transmis l'amour de ce magnifique sport qu'est le football. De mon côté, c'est mon papa et mon grand-père. Mon papa m'a donné le prénom Kevin en hommage à Kevin Keegan son joueur préféré. Mon grand-père a été sélectionné deux fois en équipe de France junior mais étant le 14ème enfant de la famille, il leur était impossible de payer les frais pour mon grand-père (à l'époque les familles devaient financer les voyages).

J'ai tout de suite aimé ce sport, je l'ai kiffé. J'ai suivi mon papa qui jouait dans l'Yonne à Villeneuve-la-Guyarde, puis Mailly-le-château et Courson-les carrières. Le foot était partout chez moi, partout dans ma tête. Je jouais au foot avec mes GI Joe où le dé du Yams faisait office de ballon. Un caillou, un ballon de baudruche, une balle de tennis, une bouteille d'eau et j'étais mes idoles qui marquaient le but de la victoire. Les Cocard, Vahirua et consort. Puis on m’a biberonné aux couleurs bleues et blanches de l’AJ Auxerre.

Je ne suis pas unique dans ce que je raconte mais j'ai besoin de le poser, de l'écrire tellement je suis triste et en même temps épuisé, KO de ce que je vis chaque samedi.

J'ai commencé à être éducateur vers l’âge de 15-16 ans. J'en ai aujourd'hui 42. Je ne pensais jamais qu'un jour je dirai stop par ras-le-bol. Mais là, j'ai envie de chialer (au sens propre) chaque week-end tellement je ne me reconnais plus dans ce monde amateur.

Le football c'est toute ma vie. Et je ne sais plus comment faire pour le kiffer.

La compétition rend dingo

J'ai eu la chance de pouvoir entraîner à un niveau régional, de côtoyer des gens du monde pro mais j'aime être à la base du football. J’aime ce monde amateur, j’aime construire, bâtir et transmettre ce qu’est le vrai football. Celui qui au départ voit naitre les plus grands joueurs dans chaque petit club entouré de bénévoles.

Mais j’ai l’impression que ce monde se perd. C'est-à-dire que même en D1 senior des coachs ne parlent qu'argent. J'ai entendu un jour un coach "Moi, en-dessous de 500€ je ne signe pas". Chacun est libre mais moi, je parle foot et après si on me propose un truc on en discute. On me dit souvent que je suis bête, que je devrais me vendre avec mes diplômes et mes compétences. Mais je ne suis pas comme ça.

Je me suis auto-financé mon BMF, je n'ai jamais touché 1 centimes pour encadrer ou coacher. Au mieux, on me donnait pour mes frais car j’habitais loin et que je couvrais le club au niveau régional. Mais j'en étais de ma poche et ça a duré 1 an. 

Dans un de mes anciens clubs, j'étais coach U17 et responsable technique du club d'une ville de 6500 habitants. J'étais tous les jours au stade, j'ai construit la politique technique en obtenant les labels, et en étant élu meilleur club jeune. Je ne touchais rien, pas un copeck. Ce n’est pas grave, j'ai choisi, j'aimais ce que je faisais. 

Mais encore plus que l'argent, c'est le pouvoir et la compétition qui rend les gens dingos.

Même dans le foot amateur, il y a des coups de pute totalement naze. Tu n'as rien à gagner, mais certains aiment aller salir un homme ou une femme bénévole. D'autres vont prendre malin plaisir à t'insulter au bord d'un terrain car tu viens de tel coin ou de tel club. Et je ne parle même pas des pseudos éducateurs qui ont des comportements dégueulasse au bord d'un terrain. Même en U11.

Les parents ? Je serais peut-être plus indulgent avec eux finalement. Pourquoi ? Car beaucoup rêve d'avoir le futur Mbappé dans sa maison ou la nouvelle Eugénie Le Sommer. Même chez les filles ça devient n'importe quoi.

Indulgent car ce sont nos instances, nos clubs qui doivent faire en sorte que les débordements s’arrêtent.

Je n'ai plus la force

Cette saison j'ai pris une licence dans un petit club familial où les valeurs humaines et footballistiques me vont comme un gant. J'ai en charge les U17 D1 et les U11 de la catégorie à mon fils. Et je m'occupe un peu des spécifiques de ma fille, le temps que son coach se remette d'un infarctus. J’habite à 30km du club et je ne demande rien. J'y vais car ça me convient et que je vois mes deux enfants avec le sourire sur le terrain. C'est ça ma récompense.

C'est la première fois depuis des années que j’ai des parents de joueurs qui sont clean. Pas une prise de tête, pas un coup de sang, toujours en soutien. Ça c'est le kiffe. Mais parce qu'il y a un président, un club et des bénévoles qui travaille sur les valeurs et les comportements de ses licenciés avant de voir l'aspect sportif. 

Mais chaque week-end, tu es confronté à des comportements de plus en plus hallucinants. 

Quand tu vas jouer à l'extérieur, que tout autour du terrain il y a des insultes, de la provocation, une tension pour essayer de te faire craquer. C'est quelque chose que je ne comprends pas pour un match de niveau départemental où il n'y a ni montée, ni descente et où les deux équipes sont en fond de classement. Je râle une fois, sur un hors-jeu que je considère grotesque et c'est moi qui suis à deux doigts de prendre un jaune. Pourquoi ? Parce qu'en face ils sont allés dire à l'arbitre que j'avais dit "Ferme-là" à leur assistant. Je n'ai jamais eu un mot déplacé en tant que coach, ni en tant que joueur et pour je ne sais quelle gloire on insinue des choses fausses. Ça me dégoute.

Je ne comprends pas que des remplaçants viennent te chambrer jusque dans ta zone, l'un d'eux crache juste devant toi. Si je suis con, ça part en couille. Si je ne dis pas à chaque match, à chaque séance à mes joueurs "Vous restez concentré sur votre match. On a un blason à respecter. Le reste c'est mon problème", à tout moment mes joueurs aussi peuvent dégoupiller.

Être éducateur, c’est ça à mes yeux. Vouloir gagner mais pas n’importe comment, pas à n’importe quel prix. Je suis déjà allé voir un arbitre pour lui dire de refuser un but car mon assistant n’avait pas levé. Je ne veux pas gagner d’une sale manière. Je n’ai pas défendu en commission de discipline un de mes éducateurs ayant eu des propos très limite, envers des personnes d’un autre club. Hors de question de valider cela. Je transmets quoi comme valeurs à mes enfants après ?

Je me bats depuis toujours pour la beauté de notre sport, je le trouve magnifique mais je ne m'investis pas pour ça. Je ne viens pas le week-end pour vivre ça. Encore moins à un niveau où on n'a rien à gagner. Qu'est-ce que j'en ai faire de gagner ou de perdre ? Bien sûr je joue pour l'emporter mais pas n'importe comment et surtout pas en trahissant les valeurs que je porte.

Mes joueurs pleuraient à la fin de frustration. Mais je les ai félicité car ils étaient allés au bout d'eux même et qu'ils avaient su garder la tête froide et ne pas répondre aux provocations. Je n'ai peut-être pas gagné 3 points, mais ont gagné le respect de beaucoup de monde ce jour-là. Et pour moi, c'est le principal.

Simplement, je suis épuisé nerveusement. Je ne prends pas de plaisir à coacher dans ces conditions et même si ce n'est pas tous les week-end, ça l'est beaucoup trop souvent. Le président du District est triste de m'entendre vouloir arrêter.  Beaucoup essaye de me convaincre de ne pas lâcher mais ça me prend trop aux tripes. 

Je veux juste voir mes enfants sourire sur le terrain et kiffer. 

Kiffer, putain mais kiffer

Bien sûr je ne vais pas tout arrêter car j'ai des enfants qui jouent et je vais les suivre. On m'a dit il n'y a pas longtemps "Tu devrais essayer de rentrer au district, apporter ta vision, tes valeurs". Mais non. Même si je respecte certaines personnes, d'autres n'ont pas ces valeurs même dans nos instances et à cet-instant je n'ai plus envie de me battre.

Je sais que tout ça, c'est partout, que certains disent qu'il faut "prendre de la hauteur", que c'est le folklore du foot. Ben comme pour la banderole et les chants à Nice samedi soir, ce n'est plus acceptable. Et j'ai encore plus de mal à le comprendre dans notre monde amateur où tu n'as rien à gagner.

Certains me disent, plus haut peut-être que ça te conviendrait plus. Johan Radet me disait «tu es fait pour être avec les jeunes. Tu as la fibre, tu comprends leur fonctionnement et ton vécu d'éducateur de quartier, de malade, dans un centre de formation serait un plus pour un club. Tu as des choses à transmettre". Ok, pourquoi pas mais est-ce que je m'y retrouverais ? Et puis encore faut-il avoir une opportunité. 

J'ai envie de kiffer c'est tout. Tout le monde devrait juste avoir cela en tête, « kiffer » putain. Ce sport est si beau, si grand. Qu'apporte cette haine, cette violence souvent gratuite. Mais c'est pareil sur les réseaux sociaux. Il n'y pas à discuter avec ces gens-là, on signale, on bloque. 

Habib Beye a raison, les instances doivent taper fort. On doit arrêter les matchs pour ces agissements, ces banderoles, ces pressions extérieurs, pour des chants ou des cris racistes ou homophobes, etc... On doit juste laisser les acteurs jouer, les supporters faire du bruit et mettre le feu de la meilleure des manières. Le football a tellement de belles choses à mettre en avant. 

Ce n'est pas parce que cela se faisait avant, que c'est "une tradition". Mais les médias c'est pareil, certains chroniqueurs ou journaliste entretiennent cette haine ou en tout cas ce côté violent dans les mots. J'ai arrêté de suivre l'After ou l'Equipe du soir car par moment c'est d’une violence inouïe. Je n'écoute même plus Rothen c'est toujours hyper négatif sur tout. Il faut chercher le buzz.

On met toujours en avant le négatif.

L'équipe de Greg pour moi c'est une super émission. On a le droit de critiquer, de se chamailler au bord d'un terrain, ce n'est pas le monde des bisounours mais remettons le football au centre de tout. 

Peut-être que je suis brouillon dans mes explications, peut-être que ce que je dis est de la merde mais tant pis. Ce n'est que mon humble avis. 

C'est mon cœur qui parle. 

Je suis fier que mes deux enfants aient choisi le côté humain dans le choix de leur club, plus que le côté compet alors qu'ils pouvaient intégrer le meilleur club du département. Ils y viendront peut-être un jour mais en attendant, ils gardent l'esprit de base du foot, les copains et le kiffe. 

Les chiens ne font pas des chats.

Bon lundi de Pâques

Prenez soin de vous

Peace

Kev

 

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